L’irradiation laser accélère-t-elle le déplacement dentaire
IL y a actuellement beaucoup d’intérêt à propos des méthodes accélérant la vitesse du déplacement dentaire orthodontique. Cette nouvelle étude montre que l’application de lumière laser a un effet. Regardons-la de manière critique.
J’ai déjà publié à propos de différentes méthodes pour accélérer le mouvement dentaire. Ma conclusion globale est qu’il peut y avoir un effet. Cependant, beaucoup plus de recherche est nécessaire. Une équipe d’Arabie Saoudite, du Pakistan, et de Malaisie a mené cette étude. Ce papier a été publié par l’American Journal of Orthodontics.
Irfan Qamruddin et al
AJO-DDO: DOI: http://dx.doi.org/10.1016/j.ajodo.2017.03.023
Ils partent du principe qu’ils vont répondre à la question suivante : “L’application de la thérapie par Laser Basse Energie ( LLLT : Low Level Light Therapy) influence-t-elle la vitesse du déplacement dentaire et réduit-elle la douleur d’origine orthodontique ? »
Comment ils ont procédé ?
Cette équipe a mené un essai Clinique randomisé en simple aveugle selon la structure PICO suivante :
Population : des patients de 12 à 25 ans traités orthodontiquement pour une malocclusion de Classe II division, nécessitant des extractions bilatérales de premières prémolaires.
Intervention : LLLT appliquée sur 10 points autour de la canine en cours de recul par des ressorts.
Comparaison : lumière laser placebo.
Outcome (critère de jugement): La distalisation de la canine a été mesurée selon des modèles 3D. La perception de la douleur mesurée par un questionnaire.
Ils ont traité tous les patients avec des brakets autoligaturants et n’ont fait extraire les prémolaires que 21 jours après la mise en place d’un arc acier 19×25. Ils ont ensuite commencé le recul canin. La thérapie par lumière laser faible puissance a été appliquée au départ, puis à 3 et 6 semaines après que la rétraction canine ait commencé. Ils ont mesuré le déplacement dentaire à 3 moments de la semaine, pendant 12 semaines.
Ils ont utilisé un schéma “split-mouth” (en bouche divisée) et ont alloué le côté de l’intervention au hasard. Impossible de trouver des informations dans la publication sur la mise en aveugle de la collection des données.
Qu’ont-ils trouvé ?
Les résultats montrent que l’application de la LLLT augmentent le taux de mouvement orthodontique mais a un effet faiblement significatif sur la perception de la douleur. Voici le tableau de données :
HEMI-ARCADE TESTÉE (MM) | HEMI-ARCADE PLACEBO (MM) | MEAN DIFFERENCE (MM) | P | |
T0-T1 | 1.8 (1.68-1.93) | 0.79 (0.6-0.98) | 1.01 | 0.00 |
T1-T2 | 1.4 (1.16-1.64 | 0.8 (0.6-0.99) | 0.6 | 0.00 |
T2-T3 | 1.59 (1.41-1.77) | 0.79 (0.67-0.91) | 0.8 | 0.00 |
Qu’est-ce que j’en pense ?
Sur mon article précédent sur les essais cliniques randomisés, j’ai minutieusement observé les méthodes, pour relever les problèmes qui influenceraient mon interprétation des résultats.
Je vais faire la même chose avec ce papier.
Malheureusement, j’ai trouvé plusieurs problèmes qui sont :
-Il y a des informations limitées sur la construction et l’organisation des étapes de l’étude.
– Il ne semble pas collecter les données à l’aveugle.
– la taille de l’échantillon est très petit, il en résulte de larges écarts de confiance à 95%.
– L’âge moyen de l’échantillon est de 19 ans. Ce qui veut dire que les résultats ont peu de chance d’être applicables aux enfants.
En cela, je ne peux m’empêcher de penser que cette étude est à haut risque de biais.
Pour finir, la proportion de l’effet est faible (0,8mm). C’est important à relever quand on considère que les patients ont dû se rendre à la clinique toutes les 3 semaines pour obtenir ce gain restreint. Je ne suis pas sûr que cela justifie d’alourdir le traitement et son coût.
Je suis navré d’être si critique à propos de cet article et de cette technique, mais malheureusement le niveau de preuve pour soutenir l’utilisation de la LLLT ne semble pas apparaître être suffisante pour le moment.
Emeritus Professor of Orthodontics, University of Manchester, UK.